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Les diaboliques

Henri-Georges Clouzot, 1955

Christina mène une existence malheureuse auprès de son mari, le tyrannique Michel Delasalle, directeur du pensionnat pour garçons dont elle est propriétaire.

Elle sait qu’une des institutrices, Nicole Horner, est sa maîtresse, mais cela n’a pas empêché les deux femmes de se rapprocher l’une de l’autre.

Christina voit en effet en Nicole une compagne d’infortune, partageant avec elle sa haine envers Michel. Lorsque Nicole demande à Christina de l’aider à tuer Michel, celle-ci accepte.

Durée 114 minutes

  • Simone Signoret : Nicole Horner
  • Véra Clouzot : Christina Delassalle
  • Paul Meurisse : Michel Delassalle
  • Charles Vanel : le commissaire à la retraite Alfred Fichet
  • Pierre Larquey : monsieur Drain
  • Michel Serrault : monsieur Raymond
  • Jean Brochard : monsieur Plantiveau
  • Noël Roquevert : monsieur Herboux
  • Robert Dalban : le pompiste

AUTOUR DU FILM

  • Parmi les élèves du pensionnat se trouvent deux enfants célèbres : Georges Poujouly et Johnny Hallyday.
  • Le film est très différent du roman « Celle qui n’était plus » de Boileau-Narcejac car, dans celui-ci, les personnages sont inversés : l’époux et sa maîtresse assassinent l’épouse, le mari finit par se suicider. L’époux est simple voyageur de commerce, l’épouse est femme au foyer à Enghien-les-bains et la maîtresse, médecin à Nantes, est montrée comme ayant un statut social et une intelligence plus élevés. Celle-ci est en fait la maîtresse des deux époux et les manipule.
  • Le film a fait l’objet, en 1996, d’un remake réalisé par Jeremiah S. Chechik, sous le titre Diabolique, interprété par Sharon Stone (la maîtresse), Isabelle Adjani (la femme) et Chazz Palminteri (le mari). La fin en est toutefois très différente.
  • Avant ce remake de 1996, une première adaptation américaine en avait été donnée en 1974, pour la chaîne télévisée ABC, intitulée Reflections of Murder, avec Tuesday Weld, Joan Hackett, et Sam Waterston.
  • Alfred Hitchcock, après le succès du film, demanda à Boileau-Narcejac de lui écrire un scénario dans la même veine que celui des Diaboliques : ce fut Sueurs froides.
  • À noter, l’apparition de Jean Lefebvre en soldat ivre et celle de Michel Serrault, qui débutait au cinéma.
  • Clouzot place une partie de l’action à Niort dont il était originaire.
  • La scène du transport de la malle hors de la maison de Nicole a été tournée à Montfort-L’Amaury, petite rue près du centre-ville. Henri-Georges Clouzot résidait, à cette époque, dans cette petite ville des Yvelines où d’ailleurs les extérieurs du film Le Corbeau ont été filmés.
  • Le pensionnat Delasalle est le château de L’Étang-La-Ville dans les Yvelines, à l’époque laissé à l’abandon, après son utilisation comme casernement par un régiment allemand pendant l’occupation; Henri-Georges Clouzot avait fait creuser dans la cour une piscine sommaire sans arrivée ni évacuation d’eau, mais profonde.
  • Clouzot était un maniaque du réalisme : les scènes de nuit étaient réellement tournées la nuit avec tous ses inconvénients.
  • La scène d’immersion du cadavre dans la piscine a été tournée avec un vrai corps, celui bien vivant du garde-barrière tout proche. Cette scène nocturne a donné lieu à trois ou quatre prises, perturbées par des aboiements, des claquements de portière, l’indiscipline des gens du village venus assister à « l’exploit », au grand dam du garde-barrière frigorifié. Tout cela pour qu’à l’écran le corps chutant ne soit pas visible.
  • Clouzot était extrêmement exigeant avec Véra, son épouse dans la vie, comme avec tous ses acteurs. Il pouvait la secouer physiquement, lui crier après, la pousser à bout, lui faire refaire dix-huit prises d’une scène de quelques secondes.
  • Après y avoir tourné quelques scènes d’intérieur, Clouzot songea à transformer le château en studio de cinéma puis y renonça devant l’ampleur des travaux. Quinze années plus tard, la commune racheta puis restaura le château pour en faire sa mairie.
  • Le commissaire Fichet joué par Charles Vanel a souvent été mentionné comme probable inspiration pour le personnage de Columbo, créé pour la télévision et le théâtre au début des années 1960, puis définitivement incarné par Peter Falk au tournant des années 1970.

L’Enfer

Henri-Georges Clouzot, 1964

L'enfer Clouzot_64Un couple, Marcel et Odette, prend la gérance d’un hôtel en Auvergne, dans le Cantal.

Plus tard, Marcel (Serge Reggiani), dévoré par la jalousie, attache Odette (Romy Schneider) à un lit.

Il se remémore les années passées, tout en soumettant sa femme à la torture, ses fantasmes se mêlant à la réalité.

Durée 94 minutes

  • Romy Schneider : Odette
  • Serge Reggiani : Marcel, le mari d’Odette, jaloux névrotique
  • Dany Carrel : Marylou, l’amie aguicheuse d’Odette
  • Jean-Claude Bercq : Martineau, le garagiste play-boy
  • Mario David : Julien
  • Catherine Allégret : Yvette

DOCUMENTAIRE

Projet énigmatique et insolite, un budget illimité, un film qui devait être un « événement » cinématographique à sa sortie. Mais après 3 semaines de tournage, le drame. Le projet est interrompu, et les images que l’on disait « incroyables » ne seront jamais dévoilées.

Ces images, oubliées depuis un demi-siècle, ont été retrouvées et elles sont plus époustouflantes que la légende l’avait prédit. Elles racontent un film unique, la folie et la jalousie filmées en caméra subjective, l’histoire d’un tournage maudit et celle d’Henri-Georges Clouzot qui avait laissé libre cours à son génie de cinéaste.

Jamais Romy n’a été aussi belle et hypnotique. Jamais un auteur n’aura été aussi proche et fusionnel avec le héros qu’il a inventé. Serge Bromberg et Ruxandra Medrea réussissent ici une « recomposition » de l’œuvre disparue, créant un nouveau film qui raconte l’histoire de ce naufrage magnifique et qui permet au projet d’exister enfin.

AUTOUR DU FILM

  • Mario David, qui tient ici un rôle secondaire important de play-boy, jouera à nouveau dans L’Enfer, la version, celle-ci achevée, réalisée trente ans plus tard par Claude Chabrol, avec François Cluzet et Emmanuelle Béart. Il y reprend le rôle de Duhamel, le client fidèle, tenu chez Clouzot par André Luguet. Ce sera le dernier rôle de Mario, mort en 1996.
  • Assistant de Clouzot, Costa-Gavras n’assurera pas le tournage de l’Enfer, pris par la préparation de son premier film, Compartiment tueurs, qu’il réalisera à l’automne 1964. Christian de Chalonge, quant à lui, quittera le film au bout de quelques jours de tournage. Il sera remplacé par Michel Pezin.
  • Selon l’assistant réalisateur d’alors, Costa-Gavras, c’est en découvrant le film Huit et demi, de Federico Fellini, que le réalisateur Henri-Georges Clouzot eut l’envie de rompre avec le format plus classique de ses précédents films, pour tourner une œuvre d’un genre nouveau.
  • Selon l’assistant chef opérateur, William Lubtchansky, Clouzot s’est vu promettre un budget « illimité » pour ce film par les responsables de la Columbia, fortement impressionnés après avoir visionné les premiers essais et effets visuels, avant l’arrivée des acteurs.
  • Les scènes d’extérieur furent tournées à l’hôtel Garabit (rebaptisé « Hôtel du Lac » pour le film)5, non loin du Viaduc de Garabit.

Quai des orfèvres

Henri-Georges Clouzot, 1947

Quai des orfèvres Clouzot_46Dans le Paris de l’après-guerre, la jeune chanteuse Jenny Lamour fait parfois usage de ses charmes, notamment auprès d’un vieillard libidineux influent, un certain Brignon, pour se faire une place dans le milieu du music-hall.

Son mari, un brave type, Maurice Martineau, profère par jalousie des menaces de mort envers le septuagénaire, qui est retrouvé assassiné peu après.

L’inspecteur Antoine, un flic désabusé et humain du Quai des Orfèvres, est chargé de l’enquête.

Durée 105 minutes

  • Louis Jouvet : l’inspecteur-chef adjoint Antoine
  • Suzy Delair : Marguerite Chauffournier dite Jenny Lamour, la femme de Maurice
  • Bernard Blier : Maurice Martineau, le mari de Jenny
  • Simone Renant : Dora Monnier, la photographe
  • Charles Dullin : Georges Brignon, l’homme d’affaires
  • Jeanne Fusier-Gir : Paquerette, la dame du vestiaire de l’Eden
  • Pierre Larquey : Émile Lefort, le taxi
  • Raymond Bussières : Albert, le truand arrêté
  • Robert Dalban : Paulo, ferrailleur et mauvais garçon

L’assassin habite au 21

Henri-Georges Clouzot, 1942

L'assassin habite au 21 Clouzot_42Un clochard, qui vient de gagner une forte somme à la loterie, est la cinquième victime d’un mystérieux assassin qui signe ses crimes d’une carte de visite au nom de Monsieur Durand.

Le commissaire Wenceslas Vorobeïtchik, appelé par tous Wens, se voit donner deux jours pour l’arrêter. Mila Malou, son amie, veut être engagée par un imprésario, qui lui fait comprendre que si elle avait son nom dans le journal, comme Monsieur Durand, il l’engagerait.

Elle a alors l’idée d’arrêter celui-ci. L’assassin tue encore. Mila est arrêtée alors qu’elle est en chasse de Monsieur Durand et finit par demander qu’on appelle Wens.

Un agent veut arrêter un homme ivre, perché sur un bec de gaz, qui vient de l’injurier. Il tire sur ses habits, pour le faire descendre. Il déchire ainsi la poche de sa veste d’où tombe, sans qu’il ne s’en rende compte, un lot de cartes aux noms de Monsieur Durand. Au commissariat Wens reconnaît l’homme, Turlot, à qui il a déjà eu affaire. Il lui apporte l’adresse de Monsieur Durand, une pension au 21 avenue Junot.

Cette adresse il l’a découverte grâce aux cartes, que Wens a ramassées, et qu’il sort d’un chiffonnier qu’il a récupéré à la pension. Wens laisse à Mila une lettre à remettre au préfet, sous deux jours, et lui révèle qu’il espère arrêter Monsieur Durand.

Durée 84 minutes

  • Pierre Fresnay : le commissaire Wens et le pasteur Robert Lester
  • Suzy Delair : Mila Malou, la chanteuse
  • Jean Tissier : Lalah-Poor, le fakir
  • Pierre Larquey : Collin, le petit artisan
  • Noël Roquevert : le docteur Théodore Linz
  • Odette Talazac : Mme Point, gérante de la pension
  • Raymond Bussières : Jean-Baptiste Turlot, le mauvais garçons
  • Daniel Gélin : un inspecteur lors de l’arrestation finale
  • Louis Florencie : le commissaire Monet, le supérieur de Wens
  • André Gabriello : Pussot, agent de police qui arrête Turlot
  • Huguette Vivier : Vania, l’infirmière de Kid Robert
  • Maximilienne : Mlle Cuq, la romancière, vivant dans la pension
  • Jean Despeaux : Kid Robert, l’ancien boxeur aveugle
  • René Génin : Alfred, le clochard qui a gagné à la loterie
  • Sylvette Saugé : la « poule » du bistrot qui s’intéresse à Alfred
  • René Blancard : Picard, un inspecteur

AUTOUR DU FILM

Dès son premier film, Clouzot impose sa vision noire et pessimiste du monde. La tension dramatique va crescendo, jusqu’à l’ultime seconde. La mise en scène est nerveuse. Clouzot offre une galerie de personnages bien typés, aidé en cela par des comédiens talentueux. Mais le cinéaste n’épargne pas pour autant les personnages qu’il croque : les habitants de la pension des Mimosas sont dépeints sans concession et les dialogues sont caustiques et percutants.

Dans le roman original de Stanislas-André Steeman, l’action se déroule à Londres et l’enquête est menée par le superintendant Strickland. Cependant, pour son adaptation au cinéma, le romancier et Henri-Georges Clouzot décident de la situer à Paris et l’enquête est menée par le commissaire Wens. Les personnages évoluent dans une petite pension de famille nommée « Les Mimosas » ayant pour adresse le 21 avenue Junot à Montmartre, dans le 18e arrondissement. Enfin, l’assassin ne signe plus ses forfaits du nom de « Mr Smith », mais de « Monsieur Durand ».

Outre les changements concernant les noms des personnages et leur nombre, l’une des grandes différences avec le roman est que dans ce dernier, les policiers enquêtent « de l’extérieur ». La seule tentative d’enquêter de l’intérieur a été faite par une tentative de demander à M. Julie de relater ce qu’il voit et entend dans la pension de famille, mais M. Julie est assassiné par le tueur le soir même de son arrivée. Dans le roman, celui qui découvre la vérité n’est pas un policier, mais Mr Crabtree, l’un des suspects et pensionnaire de la pension de famille.